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hydrofuge de masse

August 2013 modifié dans Conseils et astuces
Bonjour à tous,

je reviens sur la question maintes fois abordées concernant l'ajout d'hydrofuge de masse dans la composition de nos mélanges.

Je précise avoir fait une recherche sur le net en général et chez les fabricants, sans succès.

Ma question est la suivante : L'ajout d'un hydrofuge de masse ne bloque t'il pas la "respirailité" des pierres reconstituées ?

En effet dans les vieilles maison (comme la mienne), sans vmc, la "respirabilité" des murs est très importante, il faut préserver les échanges gazeux et hydriques.

J'ai vu dans les différents posts sur le sujet que certains ne juraient que par ça, et à contrario, Loup dans le manuel n'en parle que pour des vasques ou surfaces où de l'eau peut stagner.



Alors pour des piliers, la question ne se pose pas, on en mets, mais pour les pierres de parement destinées à des façades extérieures ?

Merci de votre aide et bonne soirée

Réponses

  • Bonjour à tous,



    Très bonne question, OLive, concernant l'hydrofuge et sa bonne utilisation.

    Il y a souvent en effet sur le forum des questions autour du sujet. Voici mon point de vue, qui ne va pas en effet dans le sens des réponses les plus fréquentes sur le sujet.



    Tout d'abord, il est naturel pour un professionnel soumis à une garantie décennale de vouloir éliminer le moindre risque, sans perdre de temps à évaluer le risque réel. Ajouter de l'hydrofuge de masse est pour lui une solution simple et rapide au risque de gel.

    Mais pour un amateur en autoconstruction ou autorénovation, on peut voir le problème sous un autre angle. On peut prendre le temps d'évaluer le risque réel pour ne pas gaspiller inutilement son argent dans ce type de produit qui n'a rien de naturel et dont on ne connait pas le comportement à très long terme.



    A quoi sert l'hydrofuge de masse ?

    L'hydrofuge de masse est préconisé quand il faut faire barrière à l'humidité dans un ouvrage en béton ou en mortier. Il empêche l'eau de rentrer dans l'ouvrage ou de le traverser. Il est donc très utile pour réaliser des fondations, des fontaines et des bassins par exemple, ou pour empêcher l'humidité de remonter par capillarité dans des bas de murs.

    L'utilisation que nous visons nous consiste à empêcher l'eau de rentrer dans des mortiers ou bétons qui seraient gélifs, et ainsi empêcher qu'ils gèlent. Il faut remarquer cependant que l'utilisation des hydrofuges de masse pour lutter contre les effets du gel n'est pratiquement jamais mis en avant par les fabricants de ces produits...



    Que faut t-il pour qu'un béton, un mortier ou une pierre gèle ?

    Pour qu'une pierre naturelle, une pierre reconstituée ou un béton gèle, il faut d'abord qu'ils soient gélif. Mais ce n'est pas suffisant. Il faut aussi qu'ils soient plus ou moins humides ou saturés d'eau au moment où leur température descend en dessous de zéro. Mais la porosité naturelle des pierres naturelles ou reconstituées et des joints à la chaux (et aussi des enduits à la chaux) fait que si de l'eau arrive à pénétrer dans le matériau sous la pluie, elle s'évapore très vite dans l'air ambiant après la pluie. Il se produit naturellement un équilibre hygrométrique entre l'air et le matériau grâce à sa porosité. Ensuite, quand il gel, l'air est sec et le matériau aussi, et quant il pleut, il ne gel pas...

    Gélivité et présence d'eau, ça fait au moins deux conditions à remplir. Si ces deux conditions ne risquent pas d'être remplies simultanément, alors il est à priori inutile de mettre un hydrofuge de masse dans le mortier pierre ou le béton.



    Donc déjà, si vos pierres reconstituées ne sont pas gélives, elles ne gèleront pas, même saturées d'eau, et donc encore moins si elles ne risquent pas de remontées d'humidité capillaire.



    En revanche, si elles sont gélives, elles risquent de geler, mais seulement si elles sont saturées d'eau ou soumises à l'humidité permanente et aux remontées capillaires.



    Comment savoir si vos pierres sont gélives ?

    Tout d'abord, ce n'est pas parce qu'une pierre est poreuse qu'elle est gélive. Beaucoup de pierres calcaires naturelles, et certaines très poreuses, sont ingélives.

    Vous saurez si vos pierres sont gélives en réalisant un test de gélivité sur un échantillon. C'est facile à faire, il suffit d'avoir un congélateur chez soi. La méthode est décrite dans le protocole de test.

    En pratique, une pierre reconstituée à partir d'un calcaire broyé non gélif et de ciment, sans hydrofuge de masse mais simplement vibrée correctement au moment du coulage, n'a quasiment aucune chance d'être gélive.



    Quelles sont les pierres qui risquent de geler si elles sont gélives ?

    Les dalles, pavés, pierres de bas de murs humides, jardinières, bassins, fontaines, bordures de jardin et toutes les pierres posées sur le sol ou celles où l'eau risque de stagner (mauvaises pentes d'écoulement...).



    Quelles sont les pierres qui ne risquent pas de geler, à moins qu'elles soient vraiment très gélives ?

    Les pierres de murs et de murets en général qui ne subissent pas de remontée d'humidité par capillarité venant du sol et sur lesquelles l'eau de pluie ne fait que ruisseler sans stagner. Ce sont les pierres naturelles ou reconstituées en général, les encadrements, les corniches (avec pentes), les piliers, les chapeaux, etc. Il en est de même pour les joints et les enduits à la chaux par exemple. Dans tous ces cas, il est parfaitement inutile d'ajouter un hydrofuge de masse dans les mortiers. L'effet peut même être contraire à celui recherché, pour un enduit ou des joints par exemple, en provoquant l'accumulation d'humidité derrière la barrière hydrofuge.



    Il faut savoir aussi que la plupart des dégradations des pierres de taille calcaires sur les bâtiments anciens ne sont pas dues au gel, mais à l'acidité de l'air et des eaux de ruissellement et à des phénomènes chimiques liés à l'eau, aux sels minéraux et à la pollution atmosphérique. Il en sera de même pour les pierres calcaires reconstituées, avec ou sans hydrofuge de masse.



    Quant à l'hydrofuge de surface en extérieure, son principal intérêt est de protéger contre les taches, les verdissement, noircissements, et autres installations de moisissures. Il ralenti la patine naturelle des pierres.



    Personnellement je suis en zone de gel modéré, et depuis des années je n'utilise de l'hydrofuge de masse, par sécurité, que pour les dalles, pavés, jardinières, fontaines, bordures de jardin et bas de murs extérieurs. Jamais pour des piliers, ou autres pierres de taille ou de parement. D'autre part, je n'utilise pas d'hydrofuge de surface en extérieur parce que j'aime bien que la nature reprenne ses droits avec la patine naturelle et de calcin.



    Pour résumer, je dirais que si un professionnel se doit de mettre un hydrofuge de masse pour ne prendre aucun risque avec les DTU ou la garantie décennale, un amateur lui a plus de liberté, et s'il ne souhaite pas dépenser inutilement son argent en hydrofuge de masse, il peut utiliser son bon sens pour évaluer le risque réel de remontée d'humidité dans ses pierres et si besoin faire un test de gélivité en tenant compte de l'intensité du gel (température min et nombre de cycles) dans sa zone géographique, afin d'évacuer ses derniers doutes.



    Encore une fois, ce n'est qu'un point de vue parmi d'autres. A vous de vous faire votre propre opinion sur ce sujet qui n'est pas simple et peut être sujet à polémiques selon les expériences de chacun.

    Désolé pour la longueur du post.



    Bien à vous,



    Loup
  • Salut Loup,

    merci pour ta réponse, Loup c'est comme d'habitude: L'encyclopédie !

    Il ne faut pas s'excuser de la longueur du post, quand il y'a des choses intéressantes à dire il faut de la place.

    Vos réponses confirment mes intuitions et je pense que la première chose à faire c'est effectivement les tests.

    Je prends la question au sérieux car je suis à 900 mètres d'altitude en Haute-Savoie, et de part chez nous on a des vrais hivers.

    Maintenant j'ai bien compris que la pierre doit être gorgée d'eau avant le gel pour qu'il y ai risque d'éclatement.



    Salutations

    Olivier
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